Léonard est dyslexique. Il passe en 6ème à la rentrée prochaine. Quelle langue étrangère va-t il choisir ? Il aimerait bien apprendre l’anglais mais ses parents ont entendu dire que l’apprentissage des langues étrangères quand on est dyslexique est difficile. Léonard passe déjà beaucoup de temps sur ses devoirs. Ils ne veulent pas qu’il en ait encore plus et qu’il se retrouve en échec face à une langue qu’il n’arrive pas à apprendre.

Certaines langues sont plus faciles à apprendre que d’autres

Apprendre une langue qui n’est pas notre langue maternelle peut s’avérer compliqué. On peut ne pas être assez motivé, ne pas en voir l’intérêt mais aussi ne pas y arriver parce que c’est trop difficile.
C’est le cas quand on est dyslexique : on a des difficultés en lecture et écriture et on a du mal à retenir les mots nouveaux.
Il faut aussi prendre en compte les caractéristiques de la langue étrangère que l’on apprend. En effet, certaines langues sont plus complexes que d’autres et donc plus difficiles à apprendre.

Le français est une langue difficile mais il y a pire !

On dit souvent que le français est difficile. À l’oral, cette langue n’est pas très compliquée mais à l’écrit, c’est une autre histoire.
Au niveau de l’orthographe, un même son peut s’écrire de différentes manières. Le son «o» peut s’écrire «o», «au», «eau», le son «in» peut s’écrire «in», «im», «ain», «ein», «aim»
Il y a des lettres muettes : le «h» de «hibou», le «t» de «petit» ou le «d» de «foulard», des lettres doubles comme dans les mots «aller», «carotte», «enveloppe».

Au niveau de la grammaire aussi, c’est compliqué. Il faut prendre en compte le pluriel des noms et donc ajouter un «s» ou un «x» pour écrire «de jolis bijoux» et «-nt» pour les verbes au pluriel pour le différencier du singulier. Ainsi, à l’écrit, «ils jouent au foot» n’a pas la même signification que «il joue au foot». Pourtant, à l’oral, ces deux phrases se disent et s’entendent de la même manière. C’est en les lisant que l’on fait la différence. Toutes ces règles doivent êtres apprises et comprises pour être maîtrisées puisqu’on ne peut pas les entendre.
Ces difficultés font que le français est considéré comme une langue difficile à apprendre, on dit d’elle que c’est une langue opaque. Un son peut s’écrire de plusieurs façons différentes, sans règle particulière.
Mais il existe des langues encore plus opaques que le français, l’anglais en fait partie.

L’anglais quand on est dyslexique : une bonne idée ?

L’anglais est souvent considéré comme la langue indispensable à apprendre. C’est vrai que nous sommes souvent confrontés à cette langue : dans les chansons, les publicités… On conseille aux enfants d’apprendre l’anglais. Cette langue est presque obligatoire pour «plus tard» quand ils travailleront. Il est vrai que c’est la langue utilisée pour les échanges internationaux mais c’est aussi une langue difficile à apprendre.

Comme pour le français, une lettre ne fait pas toujours le même son et l’apprentissage des règles grammaticales ou de conjugaisons peut poser de gros soucis. Par exemple, le «a» dans les mots «cat», «name» «saw» se prononce différemment. Pourtant, il s’agit de la même lettre. En conjugaison, il faut retenir tous les verbes irréguliers, ce qui représente beaucoup de travail et de mémorisation, encore plus lorsqu’on présente des difficultés en langage écrit comme les personnes dyslexiques.
Ces exemples montrent que l’anglais n’est pas une langue aussi facile à apprendre que ce que l’on pourrait croire. Au contraire, elle fait partie, comme le français, des langues opaques. Elle est encore plus opaque que le français.

Les langues opaques

Il est souvent difficile de savoir comment s’écrit un mot en ne s’appuyant que sur les sons que l’on entend. Il faut avoir mémorisé son orthographe pour pouvoir le lire et l’écrire correctement. Or, on sait que la lecture, l’écriture et la mémorisation de l’orthographe sont des exercices laborieux pour les dyslexiques.
Apprendre l’anglais est donc souvent difficile pour un dyslexique, même si ce n’est pas impossible. Il est judicieux de penser à d’autres options et de réfléchir à la possibilité d’apprendre une autre langue en sixième.

L’allemand 

Au collège, les élèves ont le plus souvent le choix entre apprendre l’anglais, l’allemand, l’espagnol, voire l’italien. L’anglais, langue universelle, n’est pourtant pas la plus facile à apprendre, bien au contraire.
L’allemand, moins couru, est plus facile d’accès car la grammaire s’applique strictement. Elle est régulière, donc assez aisée à maîtriser, une fois les déclinaisons connues. Mais, il faut être à l’aise au niveau grammatical pour parler et écrire cette langue. Au niveau phonologique, elle est assez facile puisque, à part une lettre (β), toutes les autres sont semblables à celles du français et leur prononciation est régulière : une lettre = un son.

Les langues dites transparentes

L’espagnol et l’italien sont des langues dites transparentes, non opaques, puisque, en général, un son = une lettre. L’ordre des mots dans une phrase varie peu et il y a peu d’irrégularités. Ces deux langues sont donc indiquées pour les enfants dyslexiques. Mais attention au mélange avec le français, ces langues latines ayant les mêmes origines et donc beaucoup de points communs au niveau du vocabulaire.

La motivation

Choisir la (ou les langues) la plus adaptée à un dyslexique dépendra donc de l’opacité ou de la transparence de la langue. Mieux vaut préférer une langue la plus transparente possible, sans trop d’irrégularités et qui soit facile à décomposer au niveau phonologique (au niveau des sons sur le principe un son = une lettre).

Le choix doit aussi dépendre de la motivation à apprendre la langue choisie : si Léonard a développé une passion pour l’Angleterre ou les États-Unis, il voudra sûrement apprendre l’anglais. Lui proposer l’espagnol risque de ne pas l’intéresser et même le démotiver. Dans ce cas, il pourra réussir à apprendre l’anglais, à son rythme et grâce aux aménagements pédagogiques mis en place qui l’aideront dans son apprentissage. Des aménagements pour une évaluation à l’oral, et/ou ne pas prendre en compte les erreurs d’orthographe est possible en cas de Plan d’Accompagnement Personnalisé (PAP). Ces aménagements pourront favoriser la langue orale plutôt que l’écrit, des questionnaires à choix multiple (QCM), des dictées à trous, un temps additionnel, comme pour les autres matières.

Le japonais, le chinois

Il est possible que Léonard soit passionné par le Japon et veuille apprendre à tout prix le japonais. Il a peut-être la chance que son collège propose cette matière. Le plus difficile dans un premier temps sera d’apprendre et mémoriser les caractères, il devra donc être motivé par cette tâche. Certains troubles dyslexiques constatés en français, comme la confusion de sons et de lettres ne se retrouveront pas, au contraire d’autres. Par exemple, il est possible que Léonard ait du mal avec les temps des verbes ou qu’il soit fatigable rapidement, comme dans les autres matières.

Si Léonard n’a pas de préférence nette pour une langue, opter pour l’espagnol est une bonne option. L’allemand est intéressant pour sa rigueur à condition que Léonard ne soit pas rebuté par les règles de grammaire de base.
L’anglais ne doit pas être écarté mais il n’est pas forcément judicieux de proposer cette langue dès la sixième.

La langue des signes française

Enfin, peut-être que le collège de Léonard propose une langue rare mais qui pourrait lui convenir à merveille : la langue des signes française (LSF). Car il s’agit bien d’une langue à part entière, destinée à communiquer avec les personnes malentendantes et qui se «parle» par gestes. Quand on est dyslexique, la LSF est intéressante puisqu’elle s’appuie sur des gestes et non sur les sons, ne présente pas d’irrégularités et possède une grammaire simple même si exigeante.

Le cerveau s’adapte et peut tout apprendre ou presque. Il faut savoir aussi que, quand on apprend une langue et que l’on y arrive, notre cerveau travaille, s’adapte et met en place de nouvelles connexions neuronales, ce qui l’aide ensuite pour la découverte et la maîtrise d’autres langues que celle apprise initialement, quelle que soit leur opacité.
Il est donc important de choisir une langue adaptée à nos capacités mais que l’on a aussi envie d’apprendre. Cela permet de progresser, d’avoir la possibilité de la parler couramment et pourquoi pas, d’en apprendre de nouvelles.