La maman de Léon raconte :

Nous nous souvenons de périodes un peu similaires avec nos aînés, mais nous n’avons pas le souvenir que ça ait autant duré. Au départ, nous avons pensé que c’était dû aux dents, mais maintenant qu’elles sont bien sorties, nous nous interrogeons. J’ai tendance à lui dire d’avaler quand il commence à baver, mais ça n’est pas très efficace, il faudrait que je lui dise toute la journée. Son père l’essuie, lui met un bavoir, mais je ne l’imagine pas dans quelques mois faire sa rentrée à l’école avec son bavoir autour du cou.

La maman de Léon

Cette situation est retrouvée très fréquemment dans les consultations de jeunes enfants. Les professionnels se voient régulièrement interrogés autour de l’âge auquel le bavage est sensé disparaître. Si le bavage est reconnu dans le développement normal du tout petit, quand est-il sensé disparaître ?

Y’a-t-il un « âge pour baver » ?

Quand le développement et la santé de l’enfant sont sans particularité, on va observer un bavage autour de 6-8 mois. On retrouve un bavage lors de l’arrivée de poussées dentaires, durant la période de diversification, quand la bouche se perfectionne pour croquer puis mastiquer. Après 2 ans, les enfants s’arrêtent généralement de baver : la maturité des mouvements de leur bouche le leur permet.

Comment définir le bavage ?

Chaque individu sécrète de la salive et quand celle-ci s’échappe de la bouche, on va parler de « bave ». Baver est donc le plus souvent la conséquence d’une mauvaise gestion de la salive (déglutition). On peut aussi observer des situations où le patient laisse écouler sa salive parce qu’il en a trop à gérer à la fois (excès de salive). Chez l’enfant, le bavage sévère ou modéré, inquiète toujours sa famille.

Quelles sont les causes de ce bavage ?

Nous pouvons retenir deux grandes familles de causes qui permettent de comprendre cette situation chez le jeune enfant.

  • Quand l’enfant grandit, il développe de plus en plus de savoir-faire, dont ceux qui lui permettent de réaliser des mouvements de plus en plus précis avec sa bouche. Ce sont des mouvements que l’on observe quand l’enfant mange ou parle par exemple (mouvements oromoteurs). Parfois, ces apprentissages sont difficiles, et ça entraîne un bavage.
  • Dans certaines maladies, notamment digestives (Reflux Gastro Oesophagien-RGO-, lésions oesophagiennes ou oropharyngées), la déglutition (avaler sa salive) entraîne un inconfort, ce qui conduit parfois l’enfant à moins déglutir et donc à baver.

Un enfant peut donc baver, soit parce qu’il ne sait pas bien avaler automatiquement sa salive, soit parce que c’est désagréable de le faire.

Quelles sont les conséquences du bavage ?

Les premières répercussions sont sociales : un enfant qui bave, il faut le reconnaître, c’est peu agréable pour l’entourage. Cela peut générer des réponses peu adaptées. Dire à un enfant « d’arrêter de baver » est par exemple logique mais inefficace. Ne plus baver ne passe malheureusement pas par le contrôle volontaire de sa salive. Tout cela se fait sans y penser normalement.

Par ailleurs, l’enfant, en bavant continuellement ou fréquemment en journée, va s’habituer à avoir le menton humide et sa sensibilité va nettement diminuer. Contrairement à ses pairs qui ne bavent pas, l’enfant qui bave finit par ne plus sentir l’humidité générée tant il y est habitué, et ne peut donc, seul, percevoir les premiers signes de son bavage.

Enfin, l’enfant qui bave, en ne déglutissant pas sa salive de manière automatique, réduit les mouvements de sa bouche. Cet enfant passe sa journée bouche ouverte, respire alors par la bouche au lieu du nez. Il est plus exposé aux infections.

C’est tout un cercle vicieux qui va se répercuter sur sa sphère ORL. L’enfant va avoir un peu de salive qui stagne dans sa bouche ce qui peut abîmer ses dents. Sa langue, peu active, va manquer de tonicité et cela peut se répercuter sur l’intelligibilité de sa parole ou son aisance pour manger.
Quel que soit le terrain explicatif du bavage, il est important de le prendre rapidement en charge afin qu’il n’installe pas un cercle vicieux.

Qui consulter face au bavage d’un enfant ?

Dans un premier temps, une consultation médicale est souhaitable. Le médecin généraliste ou le pédiatre saura investiguer les causes organiques et orienter si besoin vers d’autres bilans, notamment vers un bilan ORL, voire vers un bilan neuropédiatrique.
Dans un second temps, le médecin sera susceptible de vous orienter vers un orthophoniste pour réaliser « un bilan des fonctions oromyofaciales et de l’oralité », voire « un bilan de langage » en fonction des éventuelles autres fragilités qu’il identifiera dans le développement de l’enfant.

En consultation, l’orthophoniste recevra les parents avec l’enfant pour échanger autour des difficultés observées et de son développement. Il examinera également sa bouche, mais aussi sa face, sa façon de manger ou de parler. À travers ces différents examens, l’orthophoniste fera le point autour des compétences de l’enfant. Il cherchera à comprendre les causes du bavage observé. Il aidera l’enfant à améliorer cette fonction en proposant les soins ajustés à sa situation avec la participation des parents.

En attendant, comment agir au quotidien ?

L’entourage qui accompagne un enfant qui bave peut proposer quelques activités quotidiennes pour éviter que ce cercle vicieux n’opère.
La tétine va entretenir des mouvements moins toniques de la bouche et de la langue. Il est donc vivement conseillé de la garder pour les seuls temps d’endormissement ou d’apaisement courts.

L’hygiène nasale (mouchage, lavage de nez) proposée à l’enfant plusieurs fois par jour, surtout en hiver, est conseillée afin de limiter les infections. Un nez dégagé et propre permettra une respiration plus naturelle par le nez. La bouche sera donc fermée et contiendra plus facilement la salive.

L’hygiène bucco-dentaire et le brossage de dents seront surveillés et contrôlés par les parents. Cette hygiène protègera les dents exposées à la salive stagnante. Le brossage développera les sensations dans la bouche de l’enfant et lui permettra d’avoir conscience des éléments qui la composent.

Enfin tous les jeux de bouche peuvent être encouragés : que ce soit pour souffler, pour aspirer, pour faire des grimaces, pour bruiter ou pour chanter, toutes ces activités vont venir entretenir la machine « face et bouche » de l’enfant dans le plaisir et sans efforts.

Si les enfants sans particularité développementale cessent le plus souvent de baver après 2 ans, il convient de consulter votre médecin si cela perdure. Il saura investiguer les causes médicales éventuelles et vous orienter, au besoin, vers les bilans complémentaires nécessaires susceptibles de vous offrir des aides plus spécifiques.
En attendant, soyez certains que vous pouvez intervenir efficacement en vous mobilisant quotidiennement autour de certains soins d’hygiène, mais aussi autour de jeux de bouche avec votre enfant.