Qu’est-ce qu’un accent ?

Ce qu’on appelle accent est une sorte de coloration de la langue parlée.
Les accents peuvent être nationaux, ce qui va permettre, à l’oreille, de différencier des locuteurs d’une même langue. Si l’on se penche sur les francophones, un Québécois, un Français, un Suisse et un Belge n’accentuent pas leurs phrases de la même façon, prononcent différemment certaines voyelles et consonnes et ont un rythme de parole qui peut être facilement reconnaissable. S’ajoutent des expressions propres à chacun de ces groupes francophones, qui vont le distinguer des autres.

Les accents peuvent aussi être régionaux. Un lillois aura une chanson du langage très différente d’un marseillais. Comme pour les accents nationaux, on va trouver en outre des tournures de phrases spécifiques à chaque région et des mots de vocabulaire qui vont faire débat et renseigner sur l’origine de l’interlocuteur (chocolatine ou pain au chocolat ?). En France, on a tendance à schématiser en grandes catégories : accent du nord, du sud, de l’est, accent parisien. Mais il existe de nombreuses sous-divisions à cette classification sommaire, et les locuteurs vont souvent se revendiquer d’une origine plus précise, renforçant un sentiment d’appartenance à un groupe particulier.

Les accents soulèvent des passions et apparaissent en toile de fond, voire en thème principal dans de nombreux films, tant ils sont connotés. On cherche à les gommer (« le brio » avec Daniel Auteuil et Camelia Jordana) ou à les mettre en exergue ( « Bienvenue chez les Ch’tis »).

Notre représentation des accents

Un toulousain va trouver qu’un parisien a un accent, alors même que celui-ci a l’impression de parler « le » français le plus classique. En fonction de notre lieu de naissance, de notre histoire et de notre environnement, nous allons avoir en tête des représentations liées à l’accent. On peut imaginer les réminiscences de certaines personnes âgées entendant un accent allemand, alors même que pour la jeune génération cela n’aura pas le même impact. Pour certains, un accent corse rappellera les dernières vacances à Bonifacio et un accent alsacien évoquera la route des vins faite l’année précédente. On assimile rapidement un interlocuteur à son accent, avec toutes les représentations subjectives qu’on en a.

Accent de naissance, tare ou avantage ?

Dans certains cas, l’accent de naissance est revendiqué comme une appartenance forte, à laquelle le locuteur tient, que ce soit parce qu’il est connu ainsi (qui imaginerait Zinédine Zidane, Céline Dion ou Bernard Laporte avec un autre accent ?), et/ou parce qu’il signe une origine géographique dont il est fier.

Dans d’autres cas, l’accent est un marqueur de la différence, que l’on voudrait gommer pour mieux s’intégrer. Cela peut être le cas de personnes immigrées, qui souhaiteraient avoir un langage qui se rapproche davantage de celui de leur pays d’accueil. Dans une moindre mesure, en ce qui concerne les accents régionaux, on a pu lire des témoignages de personnalités célèbres qui ont été desservies par un accent un peu trop marqué, lors de concours ou de promotions sociales.

On peut rencontrer des transformations naturelles de l’accent. Quand un jeune enfant change de région, il n’est pas rare de le voir s’approprier la prosodie, le vocabulaire, la prononciation de son nouveau lieu de vie. Un Nantais déménageant dans l’enfance à Perpignan aura parfois l’accent de ses camarades dès l’école primaire, par mimétisme.

Changer d’accent ?

Il est bon de préciser que l’on naît avec la possibilité de prononcer tous les sons qui existent au monde, mais que nous nous « spécialisons » dans notre langue maternelle au début de notre vie. C’est ce qui explique que nous ayons tant de difficultés à prononcer certains phonèmes (sons) qui n’existent pas dans notre langue. Ceux qui ont appris l’allemand au collège se souviennent peut-être du « ch » allemand appris avec un crayon entre les dents car il ne ressemble pas à notre « ch » français, et les élèves français, en cours d’espagnol butent parfois sur la « jota ». Nous pouvons nous aussi sourire en entendant les anglais essayer de prononcer notre « u » tant bien que mal, le son « u » tel que nous le connaissons n’existant pas en anglais.

La principale motivation pour gommer son accent est celle de l’assimilation. Si mon langage s’approche de celui du plus grand nombre de locuteurs du groupe où je me trouve, je me sentirai davantage intégré(e).
La demande de changement d’accent est souvent liée à des contraintes professionnelles.
On peut noter que certains accents entraînent des moqueries, à tel point qu’une députée avait envisagé de proposer un texte de loi contre les discriminations linguistiques en sanctionnant la « glottophobie ».

Le plus souvent, dans les accents régionaux, la coloration du langage n’entraîne pas d’incompréhension à proprement parler. En revanche, quand il s’agit d’étrangers en apprentissage d’une nouvelle langue, la question de l’intelligibilité (c’est-à-dire le fait d’être compréhensible) peut davantage se poser, voire être un frein à l’accès à l’emploi ou à la vie sociale en général. Il suffit de faire l’expérience, en pays étranger, de devoir mimer ce que l’on veut acheter faute d’un accent approprié, pour sentir à quel point une mauvaise accentuation peut poser problème dans la vie quotidienne. Si l’accent empêche de se faire comprendre par les interlocuteurs, alors oui, il est nécessaire de travailler ce point précis afin de faciliter la communication.

Si je veux réduire mon accent, qui dois-je consulter ?

Lorsque l’accent de naissance entrave la communication au quotidien, ou lorsque l’on veut modifier son accent régional pour des raisons personnelles ou professionnelles, il est possible de se tourner vers des spécialistes ou des associations qui pourront aider à adopter un phrasé, une prononciation adéquates. On peut, entre autres, citer les associations d’alphabétisation, associations français/langues étrangères, certaines associations d’insertion professionnelle, mais aussi les coachs vocaux et professeurs de diction qui vont plus spécifiquement pouvoir aider à comprendre quels points d’articulation font défaut et doivent être travaillés. Les soins orthophoniques sont en lien avec une pathologie et c’est à ce titre qu’ils sont remboursés par la sécurité sociale. L’accent n’est pas une pathologie. Dans certains cas particuliers, l’orthophonie sera possible sur prescription médicale –c’est le cas quand le patient a déjà des troubles du langage pré existants, dans sa langue maternelle, mais cela reste une exception.

L’orthophonie n’est pas indiquée pour les accents, l’apprentissage ou la maîtrise du français/langue étrangère. L’orthophonie est indiquée uniquement en cas de pathologie de la parole ou du langage.
Tout comme les particularités physiques, les accents apportent de la diversité. À moins qu’ils n’empêchent la communication, il serait dommage de vouloir les gommer pour uniformiser le langage. C’est un patrimoine vivant, en constante évolution. Des accents se perdent et d’autres se créent et c’est une grande richesse.