Patricia est très inquiète : son mari Michel, âgé de 62 ans, sort de chez l’ORL (oto-rhino-laryngologiste). Le spécialiste a diagnostiqué à Michel un cancer de la corde vocale gauche. Une intervention chirurgicale est prévue d’ici une dizaine de jours.

Comment fonctionne la voix ?

La voix est un instrument à vent. L’air qui sort des poumons remonte par la trachée et arrive entre deux petites bandes situées à l’horizontale au milieu du cou : les cordes vocales. Lorsque l’on se met à parler, les cordes vocales se rapprochent et vibrent ensemble. Le son est ensuite enrichi et transformé dans toutes les cavités de résonance qui se situent au-dessus des cordes vocales, comme la gorge, la bouche, le nez. C’est ce qui donne toute la singularité d’un timbre de voix.

À quoi ressemblent des cordes vocales ?

Les cordes vocales ressemblent à deux petites bandes très fines, qui mesurent entre 15 et 25 mm de long à l’âge adulte. Elles ont beau être très fines, elles sont faites de plusieurs épaisseurs, la couche la plus profonde étant un muscle qui va pouvoir s’étirer lors de la parole.

Que va faire le chirurgien lors de l’opération ?

Pendant l’intervention, Michel sera endormi. En passant par la bouche, le chirurgien va enlever une ou plusieurs épaisseurs de la corde vocale, soit aux micro-instruments, soit au laser. Plus la lésion est importante, plus la cordectomie sera étendue. On donne d’ailleurs des numéros aux cordectomies en fonction des couches qui ont été retirées et de la taille de l’exérèse.

Et après l’opération ?

Michel rentrera rapidement chez lui. Son chirurgien lui prescrira des anti-douleurs pour les premiers jours.
Dans certains cas, on demande au patient de ne pas parler du tout après l’intervention (même en chuchotant), dans d’autres cas, le patient a le droit d’utiliser sa voix, mais avec certaines précautions: ne pas parler trop longtemps ni trop fort. En général, il faut se garder de trop solliciter le larynx durant la phase de cicatrisation, en évitant les efforts physiques importants comme porter des charges lourdes ou pratiquer certaines activités sportives. Ces recommandations dépendent des habitudes de chaque équipe de soins. Elles sont précisées avant l’intervention. Elles sont temporaires mais indispensables pour aider à la cicatrisation. En général, il n’y a pas de difficultés alimentaires liées à la cordectomie. 

Comment Michel pourra-t-il à nouveau apprendre à parler ?

La rééducation vocale est le travail de l’orthophoniste. Le chirurgien qui effectue la cordectomie remet au patient une ordonnance pour un bilan et une rééducation orthophoniques.
Lors d’un premier rendez-vous qui se nomme «bilan», l’orthophoniste évalue avec le patient l’utilisation de sa voix au quotidien, ses capacités vocales antérieures et actuelles, sans oublier de demander ses antécédents médicaux. L’orthophoniste rappelle également les règles d’hygiène vocale: arrêt de l’alcool et du tabac, respect d’une bonne hydratation.
À ce stade, il peut être intéressant d’enregistrer la voix du patient pour permettre, par la suite, de mesurer sa progression.

Lors de la phase de cicatrisation, il arrive que le patient n’ait presque plus de voix. Certains, au contraire, retrouvent rapidement une vibration sans trop d’efforts. Cette qualité vocale dépend de plusieurs facteurs, le plus important étant la taille de la lésion et de la chirurgie qui a été faite.
Au cours des séances de rééducation, l’orthophoniste va travailler le «geste de voix» avec le patient. Cela inclut la plupart du temps des exercices de posture, la coordination entre le souffle et la vibration, et l’amplification du son en utilisant les cavités de résonance. On parle en effet avec tout le corps et pas seulement avec les cordes vocales. Le but du suivi orthophonique est de permettre à Michel de retrouver une voix qu’il pourra utiliser au quotidien, dans ses activités professionnelles, familiales et associatives. La rééducation peut être très rapide, de l’ordre de quelques semaines, ou plus longue, étalée sur plusieurs mois, en fonction de la chirurgie réalisée et des besoins du patient.

La voix de Michel sera-t-elle différente d’avant ?

Oui, avec une seule corde vocale, la voix est différente. Cependant, nous l’avons vu précédemment, la voix ce n’est pas que de la vibration. Après l’opération, Michel gardera ce qui faisait en partie la «couleur» de sa voix : sa façon d’articuler, d’utiliser toutes ses cavités de résonance, ses expressions, ses intonations.
En général, après une cordectomie, la voix est moins puissante, parfois un peu plus soufflée et l’on peut perdre un peu d’étendue vocale dans les sons graves ou dans les aigus ce qui empêche parfois de chanter les mêmes chansons qu’auparavant. La puissance et la hauteur de la voix se travaillent avec l’orthophoniste, mais la voix reste le plus souvent de faible intensité : parler en milieu bruyant est difficile.

Quel que soit le résultat vocal obtenu, il faut à tout prix limiter voire arrêter la consommation d’alcool ou de tabac si elle est régulière, car le risque de récidive existe. Dans ce cas, une chirurgie plus lourde est prévue, ou parfois de la radiothérapie ou de la chimiothérapie.

Et après ?

Michel va revoir son chirurgien ORL à intervalles réguliers après sa cordectomie. Celui-ci s’assurera que la cicatrisation s’est bien passée, puis se chargera de la surveillance obligatoire après un cancer.

De son côté, Michel aura besoin de temps pour se familiariser avec son nouveau timbre de voix et pour améliorer ses capacités vocales, accompagné de son orthophoniste.