Maxime a 4 ans. Il a du mal à dire certains mots. Parfois il articule mal, on essaie de le faire répéter mais il ne progresse pas. Doit-on continuer ?

ses parents, Élodie et Antoine.

Comment notre enfant apprend-il à parler?

Un enfant apprend à parler en étant baigné dans le langage de ses parents et de ses proches. Vers 5 ou 6 mois de grossesse, le bébé entend les sons qui l’entourent et la voix de ses parents. Après sa naissance, quand il a environ 3 mois, il commence à faire des vocalises : on dit qu’il gazouille. Peu à peu, on entend les premières syllabes que l’on appelle du babillage et que bébé se met ensuite à répéter, comme «bababa, mamama».

À 1 an apparaissent les premiers mots. Quelle joie pour les parents ! Leur réaction encourage bébé à recommencer.

À partir de ce moment-là, le langage de l’enfant va se développer dans trois directions :

– son vocabulaire, c’est-à-dire le nombre de mots qu’il comprend et qu’il peut produire, augmente considérablement. À 2 ans, il peut dire une cinquantaine de mots et en comprendre environ 300 !

– la construction des phrases apparaît, c’est ce qu’on appelle la syntaxe. Cela commence par des mots qui sont associés deux par deux comme «Papa parti, gâteau tombé» vers 20 mois ; au fur et à mesure l’enfant rajoute des mots et ses phrases deviennent de plus en plus complexes.

– son articulation s’enrichit. Au départ, il ne dit que quelques sons, toujours un peu les mêmes. On sait que tous les sons n’arrivent pas en même temps. Parfois ils sont aussi déformés ou leur enchaînement peut poser problème, c’est ce qu’on appelle un trouble de la parole. Le développement de l’articulation et de la parole sont progressifs, c’est ce qui explique que beaucoup de jeunes enfants apprentis parleurs ne disent pas le son «r» ou déforment les mots compliqués comme «spectacle».

Quand on le fait répéter, on a l’impression qu’il ne nous a pas entendus, puisqu’il redit exactement la même chose.

Cette remarque est tout à fait juste. Il faut, en effet, être certain que son enfant entend bien puisque c’est en écoutant les autres parler que l’on accède au langage, par imitation.

Si on a un doute sur son audition, si l’enfant a été souvent malade ou a eu beaucoup d’otites, s’il est régulièrement enrhumé, il faut en parler avec son médecin traitant ou son pédiatre. Celui-ci pourra éventuellement demander un bilan auditif chez l’ORL. Il faut également savoir qu’un enfant peut parfaitement entendre des bruits du quotidien même très discrets, mais avoir des difficultés à bien comprendre la parole des adultes. Ce sont des compétences différentes, d’où l’intérêt d’un bilan chez un spécialiste si l’on a des inquiétudes.

Que se passe-t-il si on fait répéter Maxime?

Lorsqu’un enfant a des difficultés d’articulation ou de parole (enchaînement des sons à l’intérieur des mots), si l’adulte lui fait systématiquement répéter ce qu’il a dit, l’enfant comprend alors qu’il a parlé «de travers». Cela peut lui donner une mauvaise image de lui, lui faire perdre confiance. Lorsque cela se reproduit vraiment très souvent, il peut s’arrêter de parler pour qu’on ne le reprenne pas ou alors développer un bégaiement car il ressent une forte pression. Ce sont des cas extrêmes, mais cela arrive !

Quand un parent reprend automatiquement son enfant pour l’aider à améliorer son articulation ou sa parole, l’enfant peut entendre un message négatif : «tu parles mal, on te comprend difficilement». Or il ne fait pas exprès de se tromper, il n’a peut-être pas encore développé les bonnes compétences. C’est un peu comme si on attendait d’un apprenti conducteur les réflexes d’un routier de longue date. C’est un peu démoralisant.

Que peut-on faire alors pour aider Maxime à bien parler?

Pour aider un enfant qui a des difficultés à prononcer les sons ou les mots, le plus efficace est de reprendre ce qu’il vient de dire, en le formulant correctement, mais sans lui demander de répéter. Par exemple, s’il dit «veux monter sur le botogan», on lui dit «ah oui, tu veux monter sur le toboggan !» sans attendre qu’il se corrige. S’il dit «oh le beau poisson ouge», on peut valider ce qu’il nous dit «tu as raison, il est beau le poisson Rouge»!

Cette façon de faire, qu’on appelle «le feedback», a deux avantages :

– d’une part l’enfant sait qu’on a compris sa demande, ce qui est très rassurant pour lui et va l’inciter à continuer à communiquer,

– d’autre part cela lui permet d’entendre le modèle précis de ce qu’on attendait, sans lui mettre la pression sur ses productions.

Certains enfants vont spontanément répéter ce que dit l’adulte, mais ce n’est pas systématique (et surtout pas obligatoire).

Et si ça ne suffit pas?

Dans certains cas, l’enfant présente un retard dans l’acquisition de son langage malgré ses efforts et l’aide de son entourage. Il a des difficultés à articuler, à dire des mots, il manque de vocabulaire, ou ses phrases ne sont pas bien construites. Il peut également avoir du mal à comprendre l’adulte.

C’est compliqué pour les parents de savoir si le langage de leur enfant est plutôt bien développé, puisqu’en général ils décodent bien ce que leur petit verbalise.

Il est alors utile de se tourner vers le médecin traitant, le pédiatre ou un autre professionnel de santé (puéricultrice de la PMI, médecin ORL) pour avoir un premier avis. En fonction de leurs observations, un bilan orthophonique peut être prescrit.

Comment ça se passe avec l’orthophoniste?

Durant un rendez-vous qu’on appelle bilan, l’orthophoniste va discuter avec les parents pour connaître les grandes étapes du développement de leur enfant, faire le point sur leurs questions et leurs inquiétudes. L’orthophoniste vérifie également si le petit utilise bien toutes les fonctions de la bouche et du nez (Respire-t-il par la bouche ? A-t-il du mal à croquer les morceaux ? Sait-il se moucher, boire à la paille, souffler avec sa bouche ?). Une attention particulière est portée aussi au développement psychologique de l’enfant : est-ce difficile pour lui de grandir, d’être autonome ?

Ensuite, l’orthophoniste prend un temps d’observation du jeune enfant en jouant, en lui proposant des activités autour de la bouche et en le faisant parler. L’orthophoniste vérifie si le développement du langage de l’enfant est conforme à ce qu’on attend pour son âge. Il existe des tests et des grilles de développement qui permettent à l’orthophoniste d’orienter son diagnostic. À cette étape, il arrive que l’orthophoniste fasse répéter l’enfant justement. Mais c’est uniquement pour une évaluation ponctuelle, être orthophoniste ne consiste pas à faire répéter des mots.

Et après ?

Si l’enfant éprouve des difficultés dans le développement de son langage, de son articulation ou de sa parole (enchaînement des sons) alors l’orthophoniste peut proposer des séances de rééducation qui passeront bien souvent par le jeu. L’enfant, l orthophoniste et les parents sont partenaires durant le suivi orthophonique. 

Elodie et Antoine ont bien fait de se poser la question. Pour aider Maxime à bien articuler, ils peuvent reformuler ce que leur petit garçon a dit sans lui demander de répéter. Ils représentent un modèle pour lui , un exemple sur lequel s’appuyer. En cas d’inquiétude, un bilan orthophonique peut-être prescrit par le médecin.