Qu’est ce que l’amusie ?

Il y a quelques mois, Alain a fait un AVC. Il a conservé le langage et s’exprime normalement mais il se plaint de ne plus entendre la musique comme avant. Il ne reconnaît pas non plus les sons des instruments : il est incapable de distinguer le son d’un piano de celui d’une contrebasse. Alain présente des lésions cérébrales consécutives à son AVC qui causent ce que l’on appelle une amusie acquise.

Son accident vasculaire cérébral s’accompagne de lésions dans les zones du cerveau impliquées dans la reconnaissance et la production de la musique. L’amusie résulterait d’une mauvaise communication ou d’un défaut de transmission d’informations entre deux zones du cerveau: le cortex auditif et le cortex frontal. Ceci surtout du côté droit du cerveau.
Son amusie touche tous les niveaux car il ne reconnait plus :

  • Les hauteurs (tonalités graves et aiguës)
  • Les mélodies (airs, musiques)
  • Les timbres (sons des instruments de musique)
  • Les rythmes (durées de sons et pauses)

L’amusie d’Alain est totale et sévère. Son neurologue lui a prescrit une rééducation orthophonique.

Que peut faire l’orthophoniste pour l’amusie ?

Les traitements orthophoniques de l’amusie qui ont montré des résultats positifs poursuivent les objectifs suivants :

  • Entraînement sensoriels à entrées multiples (écouter, mimer, bouger, voir, parler) sur la reconnaissance des hauteurs, des timbres, des rythmes et des mélodies
  • Entraînement de la voix pour la reproduction de sons, de la note simple aux mélodies complexes
  • Le schéma corporel vocal et la proprioception (sensations fines de nos mouvements des nos muscles, articulations: mâchoire, cartilages)
  • Le contrôle kinesthésique (conscience de nos contractions, des efforts dans nos mouvements)
  • Le contrôle pallesthésique (sensations vibratoires quand on produit des sons)
  • L’écoute et l’expression des émotions (aspects psychologiques)

L’amusie de développement (ou congénitale)

Louis est au séminaire et étudie pour devenir prêtre. Chaque jour, il doit entonner les chants religieux des messes quotidiennes. Il sait qu’il ne chante jamais juste et redoute ces moments qui lui occasionnent beaucoup de stress.
Louis n’a pas eu d’AVC ni de lésions cérébrales qui causent sa difficulté à ajuster les sons à la bonne hauteur, mais il n’a pas développé de compétences cognitives suffisantes pour reconnaître les notes, les chants et mémoriser les mélodies. Il a une amusie congénitale.
Il ne se rend pas compte qu’il chante systématiquement un demi-ton à 3 demi-tons en dessous des notes des partitions de chants liturgiques. Il le sait car on lui en a fait la remarque. Il s’aperçoit des réactions effarées des autres séminaristes ou des fidèles qui assistent aux offices. Il ressent une gêne croissante depuis quelques temps car il doit entonner au moins 3 fois par jour et bientôt il devra le faire à la grande messe du dimanche accompagné par un organiste.
L’amusie développementale se manifeste selon des degrés de sévérité différents. Elle concerne 4 à 5% de la population générale. Parmi les célébrités amusiques figure le révolutionnaire Che Guevara qui était incapable de reconnaître l’hymne national cubain !
Louis est allé voir un ORL pour vérifier son audition et il a été adressé à un orthophoniste car son trouble a des conséquences importantes sur l’exercice de sa profession et son mental.

L’hypomusie

Marine est professeur des écoles en grande section de maternelle et déteste chanter des comptines car elle trouve qu’elle chante faux.
Quand elle chante à l’unisson avec un groupe, Marine arrive à être à peu près dans le ton. Mais lorsqu’elle est seule, elle entend bien que son chant sonne faux. Cela la complexe terriblement. Elle fait semblant de s’en moquer et son entourage plaisante volontiers à ce sujet. Seulement, elle rit souvent jaune car elle aimerait vraiment savoir chanter.
Les personnes comme Marine, sont hypomusiques. Elles ne souffrent pas d’un défaut sévère du traitement musical mais elles sont souvent gênées ou honteuses de produire des fausses notes.

Qu’est-ce que chanter faux ?

Chanter faux c’est avoir des difficultés à ajuster les sons que l’on produit à un modèle.
Ce peut être à cause d’un défaut de perception : on entend faux et donc on reproduit faux. Ce peut être aussi un défaut de contrôle de la justesse dans la production des sons : on entend juste mais on n’arrive pas à reproduire le modèle avec exactitude.

Le réglage de la hauteur concerne trois facteurs :

  • Mécanique : l’émission d’un son juste résulte d’un contrôle musculaire (technique vocale)
  • Acoustique : une bonne perception des sons extérieurs et de ceux que l’on produit
  • Psychologique : la voix est toujours liée aux émotions.

Pour les troubles légers, la solution consiste tout d’abord à développer la perception des notes et des mélodies qu’elles composent. Pour la reproduction, il est nécessaire de reconstruire un bon schéma corporel vocal en passant par l’exploration de sa voix. Enfin la personne doit être rassurée sur sa capacité à chanter et accompagnée dans la découverte de ses possibilités vocales avec patience et bienveillance.

Qui aller voir ?

Un professeur de chant expérimenté en la matière peut être sollicité. Cependant, le recours à l’orthophonie n’est pas nécessaire sauf lorsque l’hypomusie est associée à un dysfonctionnement vocal (dysphonies).

Dans le cas d’Alain, l’AVC a eu pour conséquence l’amusie. C’est un trouble sévère qui se manifeste par un dysfonctionnement du traitement musical. L’orthophonie lui a donc été conseillé par son neurologue.

Dans le cas de Marine, c’est un geste vocal inadapté qui crée une hypomusie. Si Marine souhaite travailler la qualité de son chant, elle doit s’adresser à un professeur de chant ou un coach vocal.
Elle consultera un orthophoniste dans le cas ou elle aurait une dysphonie.