Léo a 6 mois. Depuis quelques semaines, le pédiatre a conseillé à ses parents de lui donner des purées et de la compote pour commencer ce qu’on appelle la diversification alimentaire. Mais voilà ! Le papa et la maman de Léo n’y arrivent pas. Ils commencent à être inquiets. Comment aider Léo à accepter de nouveaux aliments ?

Le jeune bébé a exclusivement besoin de lait, qu’il soit allaité au sein ou au biberon. Cela suffit à lui apporter tous les nutriments utiles à sa croissance. Durant les 4 premiers mois, c’est même le seul aliment qui lui est proposé. Ensuite, à partir de 4 mois révolus, on va commencer la diversification alimentaire, sur les conseils du médecin traitant, du pédiatre ou des puéricultrices de la PMI. Cela veut dire que, progressivement, le nourrisson va découvrir de nouvelles choses à manger, pour se rapprocher progressivement d’une alimentation variée.

Cette diversification se fait donc sur plusieurs mois, en commençant tout d’abord par des aliments très lisses, mixés finement sous forme de purée ou de compote. Il est aujourd’hui recommandé d’introduire les divers aliments assez rapidement, pour diminuer le risque allergique, sauf dans certains cas particuliers.

C’est pour cela que le pédiatre de Léo a demandé de donner quelques cuillerées de purée, en plus des biberons. Malheureusement, cela ne se passe pas comme prévu. Léo n’ouvre pas la bouche. Il fait des grimaces quand ses parents arrivent à introduire un peu de purée. En quelques semaines, ceux-ci se sentent un peu découragés. Ils ont acheté plusieurs cuillères de formes différentes, ils ont essayé de cuisiner des purées avec les légumes bio du marché  puis ils se sont tournés vers les petits pots du commerce, mais rien n’y fait. Léo ne semble pas prêt, il tourne parfois la tête, accepte une cuillerée de temps à autre mais en faisant la grimace. L’assistante maternelle a parlé aux parents des troubles de l’oralité, ce qui les inquiète un peu.

Pourquoi le passage à la cuillère peut-il être compliqué ?

Passer d’une alimentation lactée au sein ou au biberon à des repas à la cuillère représente un gros changement pour bébé. Il doit se familiariser avec un nouvel instrument, la cuillère, mais aussi avec de nouveaux goûts (particulièrement pour les enfants qui boivent du lait maternisé) et à de nouvelles textures. Le rythme d’alimentation varie également : têter est en effet généralement rapide et l’enfant enchaîne les gorgées de lait. Que de bouleversements !
La transition est très facile pour certains et bien plus délicate pour d’autres.

Comment aider bébé à accepter la cuillère ?

Il faut tout d’abord que le bébé soit bien installé. À cet âge-là, il est encore trop petit pour tenir assis tout seul. Il doit donc être bien calé pour ses premiers essais à la cuillère. Certains bébés acceptent toutes les cuillères, d’autres sont un peu plus délicats au départ, préférant par exemple le silicone et une cuillère de toute petite taille, peut-être moins creuse que les cuillères à café ordinaires.

Dans un premier temps, on peut proposer au bébé de découvrir une nouvelle saveur en mettant un petit peu de purée ou de compote sur le bout de notre doigt et en lui faisant téter. Il est également possible de verser quelques cuillères de purée dans le biberon de lait, pour commencer à en apprécier le goût. Les premières fois, il n’est pas rare que le bébé fasse des grimaces. Cela ne veut pas dire qu’il n’aime pas ! Cela veut tout simplement exprimer sa surprise face à la nouveauté. Les parents peuvent alors verbaliser « ah mais tu ne connais pas encore ! Et oui c’est tout nouveau ! » Il est très important de proposer à nouveau cet aliment lors d’un prochain repas, en toute petite quantité. Cela permet au bébé de se familiariser avec cette diversification. Cela peut prendre jusqu’à 10 présentations pour apprécier un nouveau goût, rien d’inquiétant à cela !

Au départ, les quantités de purée ou de compote sont très faibles et vont juste être une découverte qui sera complétée par le biberon ou la tétée au sein. Le lait constitue en effet l’aliment principal de l’enfant durant sa première année.

Que faire si bébé n’ouvre pas la bouche ?

Certains bébés n’ont pas le réflexe d’ouvrir la bouche lorsqu’ils voient la cuillère approcher. Cela inquiète les parents mais c’est au final assez fréquent. En effet, jusqu’à présent, le nourrisson savait essentiellement têter. Il va donc apprendre un nouveau geste ! On peut bien évidemment l’aider à acquérir cette compétence en lui proposant des petits jouets de dentition à mettre en bouche, en jouant tout doucement avec la cuillère, sans le forcer et avec beaucoup de bienveillance. 

Imaginez que vous arrivez dans un pays étranger dans lequel on mange avec un instrument que vous ne connaissez pas. Il vous faudra un peu de temps et plusieurs expérimentations pour vous y faire.

Et si bébé a des hauts-le-coeur ?

Parfois, le changement de texture alimentaire est un peu inconfortable au début. Chez certains enfants plus sensibles, cette nouvelle stimulation demande un peu de temps pour être apprivoisée. En général, le réflexe nauséeux diminue avec le temps et les sollicitations très progressives et douces, répétées au fil du temps. Plus on va proposer à l’enfant une alimentation à la cuillère, plus il va s’y habituer. Il est également utile de laisser le bébé toucher les aliments avec ses doigts. Si on lui lave les mains dès qu’elles ont touché le moindre aliment, cela envoie un message négatif à l’enfant (« c’est sale »… comment alors lui demander de l’accepter en bouche ?)

Léo ne mange donc pas 5 fruits et légumes par jour ?

C’est exact : le temps de la diversification alimentaire est long, et le lait reste encore la base de son alimentation. L’apport en fruits et en légumes se fait par petites touches, en mode de découverte, pour habituer l’enfant à de nouvelles saveurs, à de nouvelles textures. 

Que se passera-t-il quand il arrivera à manger à la cuillère ?

Au bout de quelques semaines où l’enfant mange principalement des purées de légumes bien lisses et quelques compotes en plus de ses biberons, on proposera aux parents d’introduire des protéines mixées comme de la viande, de l’œuf ou du poisson et des textures un petit peu plus grumeleuses. Mais pas de panique, tout cela est généralement fait progressivement, sur incitation des professionnels de santé qui suivent l’enfant. L’objectif est d’accompagner le bébé vers une alimentation de plus en plus diversifiée et de l’aider à mettre en place sa mastication.

Que faire si les difficultés persistent ?

Parfois, malgré tous les efforts déployés par les parents et les conseils qu’ils ont pu suivre, rien ne bouge. Bébé ne semble toujours pas apprécier les repas à la cuillère. Le médecin peut alors prescrire un bilan orthophonique avec rééducation si nécessaire. Les parents consultent alors un orthophoniste qui va les recevoir avec leur bébé.
Lors du premier rendez-vous, l’orthophoniste se renseigne sur le développement global du bébé depuis sa naissance, sur d’éventuels problèmes de santé, sur l’alimentation depuis la naissance. Cet entretien est en général assez long mais indispensable pour débuter. Dans un deuxième temps, l’orthophoniste va observer le bébé, faire un examen clinique.
Il peut, par exemple, regarder les mouvements des lèvres, de la langue, vérifier qu’il n’y a pas de restriction anatomique à l’alimentation à la cuillère. L’orthophoniste propose souvent de réaliser des essais alimentaires au cabinet, ou demande à visionner une vidéo de repas si le bébé n’a pas faim lors du rendez-vous. Cela donne de précieuses indications sur l’étape où se situe bébé dans sa progression. 

Enfin, en fonction de ses observations, l’orthophoniste pourra proposer un accompagnement vers l’apprentissage de la cuillère.

Les difficultés que rencontrent Léo et ses parents sont assez fréquentes ; elles se résorbent généralement en quelques semaines. Manger à la cuillère est une nouvelle compétence pour l’enfant, elle se met en place plus ou moins rapidement, à l’image des autres domaines de développement (la marche, le langage, la propreté). En cas de doute, les parents peuvent en parler au médecin et demander conseil à un orthophoniste qui est le spécialiste du développement des compétences oro-faciales et des troubles alimentaires pédiatriques.